Archive dans septembre 2017

“A nous les jeux”, ou Paris 2024

Le 13 septembre 2017, à Lima (Pérou), la ville de Paris s’est vu désignée par le CIO (Comité International Olympique) comme organisateur des Jeux Olympiques d’été de 2024.

Les Jeux Antiques, réinventés en Jeux Olympiques à Athènes en 1896, sont une tradition et un honneur pour les villes hôtes comme le sera Paris, qui à compter de cette annonce dispose de 7 ans pour s’atteler à l’organisation de cet événement d’envergure…

 

Un processus soigneusement réfléchi

Les 33e JO de l’histoire se dérouleront du 2 au 18 août 2024 (à l’exception du football qui débutera le 31 juillet 2024). La machine étant lancée, un calendrier strict s’érige pour l’ensemble des préparatifs ; à savoir l’élaboration du drapeau olympique (fin 2020), le choix des mascottes (2021), le recrutement des volontaires (2022) ou encore la mise en vente des billets, prévue pour 2023.

Sur les 36 sites annoncés, 26 existent déjà, 8 seront temporaires et 2 seront construits.

Le coût total des préparatifs s’élève à 6,6 milliards d’euros : 500 000 millions seront financés par la dépense publique et 1 milliard viendra directement des caisses de l’État.

Au programme, les 28 disciplines proposées à Rio auxquelles s’ajouteront probablement de nouveaux sports comme le billard et la pétanque, les comités nationaux de ces disciplines ayant déjà déposés leurs candidatures.
L’ensemble des Jeux se dérouleront à Paris-même, à l’exception des sports nautiques prévus à Marseille. Quand-à lui, le football sera réparti dans 9 stades : Bordeaux, Lille, Nice, Toulouse, Nantes, Marseille, Lyon, Saint-Etienne et le Parc des Princes (pour les « grands matchs »).

 

Un enthousiasme général…

L’annonce de l’attribution de l’organisation des Jeux Olympiques pour Paris a été reçue comme une victoire collective et très grandement célébrée. Après les campagnes publicitaires rythmées par des slogans tels que « Gagnons Ensemble », « Venez Partager » ou encore « La force d’un rêve », nous pouvons désormais admirer dans les métros, les rues, sur l’Arc de triomphe, la tour Eiffel ou encore dans les yeux d’Anne Hidalgo, maire de Paris, la fierté d’accueillir cet événement mondial.

Il convient de rappeler qu’il y a près de 100 ans (100 ans pile en 2024), la France organisait déjà les Jeux Olympiques d’été (1924) grâce au militantisme de Pierre de Coubertin (qui avait également organisé les Jeux de 1900), ce qui ajoute un caractère commémoratif à l’événement. A l’occasion des Jeux du siècle dernier, Coubertin introduit le célèbre « Citius, Altius, Fortius » (« Plus vite, plus haut, plus fort ») et en fit la devise olympique. De même, il initia le rituel de la levée des trois drapeaux lors de la cérémonie de clôture.

Aujourd’hui, Paris est bien décidée à faire de ces Jeux un événement collectif de grande ampleur, afin d’accroître son attractivité estivale et son rayonnement culturel. Pour ce, les organisateurs ont déjà annoncé que la moitié des billets seront vendus à moins de 50 euros et que certains pourront descendre jusqu’à 15 euros. Une annonce satisfaisant les divers acteurs, aussi bien les fans de sports, que les organisateurs évitant la malédiction des salles combles.

 

… pas si général que ça

Malgré la volonté d’afficher une satisfaction générale, certains échos commencent à se faire entendre. Le journal du dimanche a publié un sondage montrant que « 83 % des français soutiennent les Jeux ». Or, Il s’avère que le commanditaire dudit sondage n’est autre que MTKG, contribuable de Paris 2024, remettant en doute son objectivité.

Paris 2024 est tout d’abord remis en cause pour des raisons pécuniaires. Alexandre Delaigue, professeur d’économie à Lille I, a notamment démontré le surcoût systématique des villes hôtes. Pour cause, le délai strict imposé aux organisateurs les forçant à boucler leur projet en un temps record, doublé de la forte médiatisation mettant en jeu la réputation de la ville organisatrice. Plus courant encore, le CIO a pour coutume de faire jouer la concurrence entre les villes candidates afin d’obtenir une flambée des prix, comme ce fut le cas à Athènes en 2004.

Autres mécontents de l’attribution des jeux : les riverains et les écologistes soucieux du sacrifice de plusieurs hectares de terrains au profit de stades en béton. De même, certains parisiens se disent nuancés, heureux certes, de voir la capitale en pleine mouvance sportive, mais craintifs quant à la dégradation de la circulation et l’augmentation de la pollution, déjà largement décriées à Paris en période creuse.

Des manifestations ont déjà été organisées, notamment le mercredi 13 septembre (soir du verdict). Une cinquantaine de manifestant s’étaient réunis à Paris autour du collectif citoyen « Non aux JO 2024 », pour souligner le manque de démocratie dans cette candidature déclenchée sans l’aval d’une majorité populaire. Un mouvement dont-on entendra encore sûrement parler…

 

Mais si un fragment de la population se dit opposé à Paris 2024, nombreux sont les français impatients de vivre au rythme de cet événement sportif à caractère exceptionnel.

Quoi qu’on en dise, Paris entrera dans l’histoire aux cotés de Londres et Los Angeles, faisant désormais partie des trois seules villes à avoir accueilli trois JO. La flamme olympique brillera donc en 2024 au cœur de la ville lumière.

 

DTA! – Interview de Nathalie Avy-Elimas, députée MoDem.

C’est la première fois que vous tombez sur ce genre d’article sur « Les Décryptages ». En cette rentrée 2017, nous avons décidé de mettre en place une rubrique spéciale concernant l’actualité de l’Assemblée Nationale : “Dans Ton Assemblée!”. Au cœur des commissions parlementaires, des séances publiques et avec les députés, nous plongeons au sein de l’institution.

Aujourd’hui, nous commençons fort; avec une interview de la députée MoDem (Mouvement Démocrate, présidé par Francois Bayrou) du Val d’Oise : Nathalie AVY-ELIMAS, qui a accepté de répondre à nos questions.


Comment s’est déroulée votre arrivée au sein de l’Assemblée ?

Les personnels des services administratifs de l’Assemblée nationale ont fait l’impossible pour nous mettre dans de bonnes conditions. Je souhaite les en remercier car cela m’a permis de prendre mes marques plus sereinement et de me mettre vite en action. Pour le reste, comme mes collègues, j’ai dû, en quelques semaines, organiser ma vie personnelle, constituer une équipe, trouver un local en circonscription, répondre aux sollicitations… Le tout alors que les premiers travaux parlementaires – et non des moindres – commençaient.

Les groupes LREM / MoDem sont-ils les meilleurs amis du monde ?

La relation entre les groupes LREM et MoDem s’appuie sur la volonté des députés qui en sont membres de transformer la France pour qu’elle entre enfin dans le 21e siècle et qu’elle s’adapte au monde qui l’entoure.

Nous avons nos sensibilités – et cela est même vrai au sein d’un groupe – mais nous sommes d’accord sur l’essentiel, à savoir la nécessité de réformer notre pays en modernisant notre économie, en remettant l’éducation au centre de notre cohésion nationale et en redonnant confiance à nos concitoyens dans leurs institutions et leurs représentants.

Il ne faut pas lire les choses de manière binaire : amis ou ennemis. Nous sommes partenaires. Nous ne serons pas d’accord sur tout mais nous souhaitons tous avancer dans le même sens.

Pourriez-vous voter contre une loi si elle ne vous semble pas intéressante ou n’allant pas dans le bon sens ?

J’ai la chance d’appartenir à un groupe – le MoDem – dont les membres partagent en commun un grand nombre de valeurs. Il y a donc des chances pour que je me retrouve dans les positions du groupe.

Si cela n’était pas le cas – et notamment si je considère qu’une ligne rouge pourrait être franchie – je n’exclurais pas de voter contre en séance. Mais cela se ferait en bonne intelligence et après discussion avec les dirigeants du groupe.

Avec deux très grands groupes majoritaires, comment cela s’organise en interne ?

Les échanges sont constants entre les dirigeants de nos deux groupes. Pour le moment, j’ai plutôt l’impression que cela fonctionne. De mon point de vue, Marc Fesneau, jusque-là secrétaire général du MoDem représente très bien notre groupe dont il porte la voix au sein de la majorité. Je regarde donc cela de loin et souhaite me concentrer sur mon propre travail à l’Assemblée, au sein de la Commission des affaires sociales.

Quels sont vos horizons d’attente pour cette rentrée parlementaire ?

A court terme, le PLF et le PLFSS constitueront les deux temps forts de l’actualité parlementaire. Les politiques publiques conduites depuis 10 ans ont abouti à une désertification dans les territoires ruraux : moins de services publics aux personnes (santé, éducation, leviers sociaux) et une déliquescence de la présence de l’Etat près de ceux qui en ont le plus besoin. Je m’inscris totalement dans l’ambition du président de la République dans sa volonté de revenir vraiment au principe d’égalité. L’Etat doit faire plus pour ceux qui cumulent les difficultés et j’espère que ces premiers PLF et PLFSS du quinquennat apporteront une réponse en ce sens.

Aujourd’hui, les citoyens des « quartiers » et ceux des milieux ruraux ont le sentiment d’être délaissés. Pour rester fidèle à ses principes, la République ne doit pas lâcher ces territoires. Il est intéressant de noter d’ailleurs que la carte des territoires souffrant d’un manque de services publics et celle de ceux ayant majoritairement voté pour un candidat populiste au 1er tour de la présidentielle se superposent.

Quelle est la chose qui vous a le plus surpris au moment de prendre vos fonctions ?

Incontestablement la masse de sollicitations. Je reçois chaque jour de nombreuses demandes. Mes attachés parlementaires m’aident heureusement à y répondre. Sans eux, il me serait difficile de me concentrer sur le fond des sujets que je traite.

« Je souhaite porter la voix de la sensibilité démocrate et humaniste »

Un député, c’est quelqu’un de terrain ou de fond ?

A l’heure d’Internet et des réseaux sociaux, mais également de la forte demande en démocratie participative, il me semble difficile pour un député d’occulter complètement le terrain. D’un autre côté, beaucoup de députés ont une compétence « métier » ou technique sur certains sujets. Je peux alors comprendre qu’ils soient tentés de se spécialiser sur des thématiques qu’ils maitrisent. René Dosière, dont le travail a été considérable pour faire avancer les choses sur la transparence de la vie publique, illustre parfaitement ce type de député.

Chaque député doit trouver son style. Pour ma part, je souhaite porter la voix de la sensibilité démocrate et humaniste à la Commission des affaires sociales, notamment sur les sujets liés à la santé. Mais je compte bien garder mes réflexes d’ancienne adjointe au maire : rencontrer les habitants et rester à l’écoute de ce qu’il se passe dans mon territoire, là où je vis, où mes enfants vont à l’école et où j’ai longtemps travaillé. Je suis notamment en train de mettre en place un comité participatif, ouvert sans considérations partisanes aux habitants et aux usagers de la circonscription qui souhaiteront collectivement faire avancer un sujet ou co-construire des solutions législatives.

– Propos recueillis par Arthur Lambert.


Nous remercions encore Mme Avy-Elimas pour avoir répondu à nos questions et vous disons à bientôt pour de nouveaux articles !

Al-Jazeera: torn by Arab regional tensions

June 5, 2017; rude awakening for Qatar. No less than 10 Persian Gulf countries, led by Saudi Arabia, decide to sever all diplomatic relations with Doha (the Qatari capital). All land, air and sea borders are closed, as well as the offices of news network Al-Jazeera in Riyad (Saudi Arabia’s capital). In June, Qatar received an ultimatum: they had to agree to 13 conditions intended to ease regional tensions. One of them was to shut down the entire Al-Jazeera company. Les Décryptages explain how the “Arab CNN” became the center of international political demands.

Thunderous beginning

In 1996, Hamad Ben Khalifa, Qatar’s head of armed forces, decided to unseat Khalifa Ben Hamad – his own father – and to seize power. He then started to actively modernize the young emirate, which had gained independence in 1971. Modernization included increased visibility for Qatar on the regional and international stage, and this happened via a two-word tool: “Al-Jazeera”.

Literally meaning “the island” in Arabic, Al-Jazeera news network had one goal: to end the Saudi hegemony on Arab TV. It set about becoming the first Arabic-speaking news channel, reaching far beyond the Gulf. In the entire Arab region, from Morocco to Algeria to Cisjordania, Arabic-speaking journalists were poached by the growing Qatari firm. The news are now produced in Arabic, by Arabs, for Arabs.

Success built gradually. In 2008, Al-Jazeera was watched daily by 30 to 40 million people. Celebrities, like Fayçal Al Kaceem, moderate impassioned debates over political, religious, cultural, and economic issues, which sometimes end in live altercations. The chain truly reflects the arab world, down to the tiniest detail…

Before Al-Jazeera, the Arab TV industry was controlled by two distinct spheres. First the BBC, a single British news operation with an international-oriented continuous feed. Second, a series of national chains, each controlled by its government, and each unapologetically praising its current regime. Al-Jazeera positions itself between these two spheres: no apparent government control, and no foreign control.

This “independent” editorial line serves the company’s image: calling the network “island” was not random. The apparent lack of ties ensures news “objectivity”, and insularity is promoted. The slogan conveys a similar message: with Al-Jazeera, you get “the opinion, and its contrary”.

“Independence and its contrary” ?

Compared to other Arab channels, Al-Jazeera seems to have a different, remarkable tone. As early as 1998, Al-Jazeera breaks with the usual editorial line of the Arab media landscape by publishing its own images of bombings in Irak, while other chains downplay the damages caused by the attacks.

However, Al-Jazeera is at the heart of a controversy, accused by its competitors of “providing a loudspeaker to islamism”. After the September 11 attacks, the Qatari channel notably showed videos filmed and sent by Oussama Ben Laden himself. Years later, this reputation led Mohamed Mera to send videos of his massacres of children from the Ozar Hatorah school, that Al-Jazeera chose not to broadcast.

Opponents to Al-Jazeera also question its independency. Since it is a tool of the Qatari soft Power, the network leaders cannot choose themselves which images to publish. Each coverage of external events seems to be consciously thought out. Indeed, it is easy to guess the state of diplomatic relations between Qatar and its neighbours by looking at the angle used to cover foreign events.

Al-Jazeera has even shown support for and given a platform to people strongly opposed to particular regimes. The show “Charia and life”, features Youcef Al-Qardawi, a preacher from the Muslim Brothers movement. The brotherhood is considered a terrorist organisation by the Egyptian government. No doubt such support from this media was one of the main reasons why Egypt joined Saudi Arabia in the recent diplomatic spat with Qatar. In other words, Qatar seems to have a more or less discrete control over Al-Jazeera’s editorial line. Last but not least, Al-Qardawi is also renowned for provocative positions that led to his forbidding of European countries.

Meanwhile, there are no articles about the Qatari state. Human rights, wealth inequalities… “Al-Jazeera” talks about other countries but remains mum on Qatar.

Expansion.

The future was bright for Al-Jazeera. Viewers were many, the chain was in a situation of quasi-monopoly in the Arab news media industry. It was a true empire in process of building up.

Al-Jazeera soon had two little twin sisters in the UK and Bosnia. The sports channel Al-Jazeera Sport was then born, allowing international development. Likewise, BeInsport was created in France, seriously hurting older, monopoly-like networks such as Canal+. The American subsidiary of the channel with a gold logo, Al-Jazeera America was also created, with a French subsidiary soon to follow.

Each channel has a specific editorial line depending on its audience. For instance, Al-Jazeera English tends to lend a voice to Third World countries with numerous correspondents in Africa and Asia. The style of these channels is more restrained, with less polemic shows than the original one.

Threatening influence

This fast expansion also brings tensions. Particularly in Saudi Arabia, scared by the prospect of increasing Qatari influence, beyond the Persian Gulf boundaries.

Indeed, Saudi Arabia has always had expansionist views in the region; Qatar is one of the emirates most threatened by this goal. In 1921, Ibn Séoud, founder of the Saudi Arabian Kingdom, set about taking the Qatari land. He was stopped by a strong refusal from the British colonies, and Qatar’s existence is only due to the British presence in the region. For Saudi Arabia, which considered the emirate was part of its own territory, an ambitious emancipation can be perceived as an humiliation. Particularly when Qatar shows pride and becomes a real competitor in terms of regional influence. Thus, the very existence of Al-Jazeera proves to be a factor that can damage relations between Qatar and Saudi Arabia.

Is the island sinking ?

Al-Jazeera seems to have encountered many difficulties these past few years. First, competition keeps increasing. Many national news channels get more viewers everyday, robbing the qatari channel of precious percentage points.

Besides, the coverage of the Arab Spring by the golden channel, accused of supporting islamist candidates in the elections, may have caused significant loss of audience.

Finally, the success of Al-Jazeera’s business expansionism should also be questioned. In 2016, during a time of decreasing fossil fuel prices, several hundred employees were laid off. It was also hard for Al-Jazeera America to find its audience, so much so that the American channel folded in April 2016.

The request from the anti-Qatar coalition appears to be the last straw: the definite end of the company is required. Qatar would lose a powerful tool for boosting its global exposure. Nonetheless, the chain has not made any declaration on its potential end. It remains to be seen whether the editorial line will be changed, which could help Qatar alleviate the consequences of the regional exclusion.


Read the original french article, written by Yunews, here : https://www.lesdecryptages.fr/al-jazeera-cris